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Photo du rédacteurOndine Peyron

« Essaye de venir à ma rencontre si tu peux ! » Les rouages de notre intimité.



Dans notre quotidien, nous sommes en recherche de lien, mais nous avons beaucoup de difficultés à partager notre réelle intimité.


Une de mes patientes, Mélanie, âgée d’une 20 aine d’années, est en couple depuis 2 ans et a peur d’habiter avec son compagnon Victor. Ils habitent respectivement en collocation et discutent depuis quelque temps d’emménager ensemble. Cette année semble la bonne mais cela réactive en elle des peurs. En particulier des souvenirs de mensonges ou d’omission de la part de son compagnon quant à des rdv qu’il avait pu organiser avec l'une de ses exs pour faire des shooting (il est photographe) ou pour prendre des cafés.


Observons les réactions de Victor.

Karpman décrit quatre obstacles à une communication intime et à la résolution de problèmes : le condescendant, l’Abrupt, le Secret et l’Évitant.


Chacun opère de manière séparée, mais tous les quatre adviennent comme une unité dont l’amplitude varie de manière alternée. Pour l’enseigner, l’auteur utilise un exercice d’images visuelles guidées dont les suggestions sont les suivantes :


Quelle serait l’attitude de Victor ?

1.Condescendante? Mélanie et ce qu’elle fait est subalterne, ennuyeux. Elle lui faite perdre son temps avec ses questions et ses reproches. Rapidement, elle voit qu’elle fait erreur et elle cesse d’essayer de se faire comprendre.

2. Abrupte ? D’une manière intimidante, Victor l’interrompt et lui demande de cesser immédiatement ou s’en va furieux. Il peut aussi de manière répétée l’interrompre en énonçant sans cesse ses propres règles et opinions. Ce qu’elle veut communiquer n’est plus d’actualité.

3. Secrète ? Victor retient l’information dont Mélanie a besoin pour résoudre le problème ou envisager un compromis. Il peut aussi l’ignorer et ne pas répondre du tout. Il refuse de donner des strokes positifs d’intérêt envers elle et ses idées, ce qui rendrait la résolution du problème plus facile. Il cache ses obstacles sexuels fondamentaux et non résolus : Effrayé, Dégoûté et Auto-Frustré. De ce fait, Mélanie ne peut pas savoir quelles sont les difficultés refoulées.

4. Évitante ? Victor change rapidement de sujet et amène ailleurs la conversation. Mélanie n’aura jamais une réponse précise à sa question. Elle est embarquée dans un problème annexe et une fois de plus rien n’est résolu.

« Il sait qu’il désire... mais, comme tellement d’entre nous, il ignore ce qu’il désire ».


Ces quatre obstacles à l’intimité interviennent de manière simultanée et empêchent ce couple à réussir à parler de problèmes sexuels ou relationnels. Ils les rendent incapables de mettre en œuvre ce que Karpman appelle les Trois Règles de la Capacité d’Ouverture aux autres, règles qu’il exige comme élément du contrat de travail avec un couple. Ce sont les capacités d’en Reparler, de Présenter Positivement et d’Aller au Bout ; chacune requérant des compétences particulières... leurs opposées étant : Faire de la Rétention, Faire des Histoires et Escamoter !


Il importe de réaliser que l’impossibilité de l’intimité est l’une des raisons pour lesquelles une solution Adulte au conflit interne est si souvent remplacée par un compromis en provenance de l’Enfant.


Penser à l’altérité, c’est s’interroger sur ce qu’est l’autre, sur notre relation à autrui. Comme l’enfant qui se découvre dans le miroir. Il s’interroge d’abord sur cet autre qui lui fait face ; il le teste, se compare, tente d’entrer en communication avec lui. Puis, vient un temps où l’image dans le miroir est adoptée comme un alter ego, un autre identique à lui, mais pas tout à fait lui. Un semblable qui ne lui répond pas. Et c’est peut-être parce qu’il ne lui renvoie aucune réponse tout en l’imitant, qu’il adopte finalement l’image comme le reflet de lui-même, devant l’interrogation de ce qu’il est. Paradoxale situation dans laquelle on pourrait penser qu’il nous faut d’abord nous connaître nous- mêmes, pour nous reconnaître dans le miroir !

Il s’agit en fait d’une juste danse perceptive où il nous faut dans un premier temps rencontrer l’autre, nous identifier à lui, avant de nous savoir différent et unique, parce que justement il ne partage pas exactement le même filtre que nous.


Consciente de mon individualité, je ressens en même temps la solitude de mon état. Et aujourd’hui, comme hier, j’ai besoin de signes de reconnaissance, qu’ils soient authentiques ou non. Quand l’autre me RE-connaît, il me donne l’occasion de me connaître à nouveau. Aurais-je tendance à oublier qui je suis quand le miroir n’est plus devant moi ?

Est-ce que cette rencontre avec l’autre est l’occasion de me savoir à nouveau ?

Parce qu’en découvrant l’autre, il m’arrive de me redécouvrir moi-même et de me re-connaître dans ce qu’il m’envoie. Comme si je m’exprimais à travers lui. Comme si nous partagions un instant le même filtre perceptif du monde.

L’autre existe en face de moi et il m’apparaît une part de mon individualité à travers lui. Nous sommes sur «la même longueur d’ondes ». Nos Enfants respectifs partagent la même émotion, nos Adultes la même déduction ou nos Parents le même principe... Nous partageons un instant le même espace et cela nous surprend parce que nous croyons entendre notre propre écho. Comme devant le miroir, pendant un court moment, nous ne savons plus si nous faisons face à nous- même ou à une autre individualité. Cette rencontre avec un autre qui m’ouvre une fenêtre vers moi-même me fait penser à ce moment musical particulier où deux instruments jouent la même note. L’effet de cet alignement parfait des ondes de chaque instrument provoque un arrêt des battements acoustiques et résonne à notre oreille comme un seul et même son. Comme si la rencontre de ces deux sons n’en formait plus qu’un, à tel point qu’on ne saurait les différencier, à tel point que la note résonne en nous avec plus de force encore. La résonance musicale peut du reste, quand elle en vient à son paroxysme, briser la matière.


Enfin, un autre que moi comprend l’univers que je m’étais représenté. Espoir d’enfant presque oublié qui provoque en moi une émotion à laquelle je ne m’attendais pas. Oui, il me semble qu’à cet instant précis, j’entre au cœur même de l’intimité. Nous partageons notre nudité psychique la plus authentique. Je trouve l’exact équilibre, l’autre me permettant en même temps de me Re-connaître justement. Nos États du Moi respectifs, synchronisés en une seule et même onde, rappelant le phénomène d’intrication quantique découvert par Einstein et Schrödinger. Deux entités séparées qui se décrivent en une seule globalité et qui partagent un temps et un espace commun alors même qu’elles sont des entités distinctes. Si nous faisons partie du monde physique alors il est probable que ce qui fonctionne pour un objet puisse aussi fonctionner pour l’esprit.

Et cela fonctionne probablement parce qu’à l’aube d’une telle rencontre, nous avons peut-être besoin de nous re-connaître dans le miroir ?!


Obstacle et Facilitation de l’Intimité

Il y a deux groupes d’obstacles à l’intimité.

Dans le premier groupe ce sont les Boucles du Perdant Évitant l’Intimité avec les quatre initiales : C-A-S-E-.


Elles représentent les obstacles transactionnels lors de discussions intimes que sont le Condescendant, l’Abrupt, le Secret et l’Évitant.

Ils sont reliés dans une boucle pour exprimer leur relation et pour faciliter leur mémorisation. Ils empêchent ces personnes d’accéder à des niveaux d’intimité plus variés ou une communication plus ouverte. S’il manque l’un des quatre obstacles, il est possible qu’il y ait un moyen d’engager la communication. Tous les quatre sont susceptibles d’exister d’emblée ou pas lorsqu’il y a méconnaissance ou transaction croisée.


Dans le second groupe, il y a une boucle de provocations complémentaire intitulée les Boucles du Perdant Envahissant l’Intimité ou I-O-E- comprenant les trois obstacles envahissants que sont l’Impatience, l’Obstination et l’Ennui.

Cette boucle représente les gens qui envahissent les frontières des autres, les obligeant à bâtir autour d’eux un mur de protection ou un CASE.

Les gens demanderont :« Parle-moi maintenant ! ! »ou« Que caches-tu ? »ou« Aime-moi de plus en plus »et ce, dans une quête incessante.

Une personne qui est dans ce besoin I-O-E- peut présenter la boucle du perdant R/C/G des trois nains impatients : Rapide, Collant et Gaveur.


Rapide : ils vont plus vite que vous ne le souhaiteriez

Collant : ils demandent plus que vous ne pouvez donner

Gaveur : ils vous donnent plus que vous ne désirez.



Un partenaire sur-sollicité sexuellement peut percevoir une personne I-O-E- comme souffrant d’une addiction sexuelle.Ces deux boucles fondamentales sont une découverte originale et recouvrent tous les obstacles transactionnels à l’intimité et à la communication.


Boucles positives

Dans la logique des constructions théoriques actuelles d’A.T., nous devons mentionner la face positive correspondante, le levier, les Boucles du Gagnant OK. Elles demandent pour garder une simplicité théorique de conserver les mêmes initiales et représenter les choix positifs OK les plus en adéquation.


Avec ces mêmes initiales, la boucle du gagnant C+A+S+E+ représente une attitude : Chaleureuse, Accessible, Sociable et Engagée car offrant un état d’esprit ouvert et bienveillant.


Chaleureux, l’opposé de Condescendant ; Accessible, l’opposé d’Abrupt ; Sociable l’opposé de Secret et Engagé, l’opposé d’Évitant.


L’alternative positive à la boucle envahissante I-O-E- est la boucle du gagnant E+R+A+ qui représente l’attitude Empathique, Relax et Attirante offrant une invitation sûre et attrayante : Empathique, l’opposé d’Impatient ; Relax, celui d’Obstiné et Attirant l’opposé d’Ennuyeux.

Ils invitent à l’intimité plutôt qu’à l’envahissement de la vie privée. Ce sont les équivalents du précédent I-O-E-.


Ce processus de "civilisation" s’inscrit dans le développement de l’homme et exige le sacrifice des désirs désignés comme interdits par la société, dont le Surmoi prend le relais. L’une des stratégies les plus communes dans ce processus est la répression, dans laquelle le Moi bannit de la conscience le désir en question et agit ensuite comme médiateur pour que ce désir réprimé trouve une expression (sublimée), de sorte que l’individu obtienne un degré de satisfaction admissible.


Par la suite, l’impasse entre les désirs fixés de l’Enfant et les injonctions et contre-injonctions du Parent, qui est également fixé, nécessite un certain niveau de médiation de l’Adulte.


Ainsi, la source des désirs sains est l’Adulte, tandis que l’Enfant est la source des désirs malsains, et aussi le Parent dans les cas où des désirs malsains provenant d’autrui ont été introjectés. Le conflit inconscient ou réprimé s’enracine donc dans une impasse archaïque, séparée par clivage, entre l’Enfant et le Parent, entre un désir fixé et une loi non intégrée, ce qui est dans la ligne de la notion des unités relationnelles d’états du moi. La frustration inhérente au désir sublimé (Adulte) résultant du conflit avec la loi externe constitue donc, au mieux, un problème à résoudre et, au pire, un dilemme existentiel.


Et vous, vous arrive-t-il parfois de vous trouver nez à nez avec vous-même en rencontrant quelqu’un "d’autre"? Plus de limites, plus de contours, juste deux individus qui ne font qu’un... Et cette rencontre qui se joue alors, est-elle le nectar de l’intimité ?


Il me plaît de croire que c’est l’Enfant qui a fait de cette rencontre un fort moment d’émotion. Réciter un poème est à la fois pudique (ce n’est pas moi qui parle, c’est Apollinaire !) et impliquant (je laisse voir ce qui me touche et j’invite l’autre à m’y rejoindre). Ce serait comme une transaction à double fond dont le message implicite serait peut-être « Tu viens jouer ? ». Cette transaction à double fond a sans doute permis à nos Enfants de communiquer soudain joyeusement et librement. C’est comme s’il y avait eu une "bascule" des états du moi, l’Enfant était le plus risqué parce qu’il ouvre la porte vers l’intimité, et cette bascule a peut-être créé le vertige décrit plus haut. Par chance, sitôt passé le mirage de cette rencontre avec moi-même, j’ai retrouvé le face à face avec une personne vraiment autre, riche d’expériences différentes des miennes, singulière dans sa personnalité. Nos "terreaux" avaient beau être communs, les plantes avaient poussé chacune à sa façon. Mais tout de même, je ne pensais pas avoir rendez-vous avec moi ce soir-là...

Des pas en avant, en arrière, parfois sur le côté.

Nos Enfants jubilent de ces pas de danse.

Nos Parents veillent sur nos pieds (!!).

Nos Adultes se regardent droit dans les yeux.


Dans toute rencontre Humaine, que ce soit dans le domaine professionnel, amical ou amoureux, ce sont deux jardins qui s’ouvrent l’un à l’autre. Reste une question bien mystérieuse : Qu’est-ce qui nous attire vers telle personne plutôt qu’une autre ? Avant même le premier mot échangé, le premier regard, pourquoi lui ? Pourquoi elle ? On se re-connaît : nous sommes-nous déjà rencontrés ? Les phéromones sont-ils porteurs de notre vécu, nos émotions, nos aspirations, de la matrice de notre scénario ? Et si nous lui laissions sa part de mystère ?





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